Fatima vit seule avec ses deux filles : Souad, 15 ans, adolescente en révolte, et Nesrine, 18 ans, qui commence des études de médecine. Fatima maîtrise mal le français et le vit comme une frustration dans ses rapports quotidiens avec ses filles. Toutes deux sont son moteur, sa fierté, son inquiétude aussi. Afin de leur offrir le meilleur avenir possible, Fatima travaille comme femme de ménage avec des horaires décalés. Un jour, elle chute dans un escalier. En arrêt de travail, Fatima se met à écrire en arabe ce qu’il ne lui a pas été possible de dire jusque-là en français à ses filles.
Depuis toujours, Philippe Faucon n’a jamais voulu se situer autre part que dans la vie. « Dans la vie » (2008), c’est d’ailleurs le titre d’un de ses films, le plus simplement touchant, le plus authentique qui soit : l’amitié entre Esther et Halima, l’une juive et l’autre musulmane, mais toutes deux issues d’un milieu modeste. A nouveau, Philippe braque sa caméra sur une femme de ménage, Fatima, et c’est encore bouleversant parce que les faits relatés me rappelle une histoire personnellement vécue. Le cinéaste ne quitte jamais le terrain de la réalité et s’attache à une communauté qu’il connaît ici et là-bas également, lorsqu’il s’y trouve – il a vécu deux ans au Maroc et deux ans en Algérie. A travers un conflit historique qui laisse de dures stigmates (« La Trahison », 2005) ou les dérives tragiques auxquelles peuvent s’exposer des jeunes désespérés et en crise identitaire (« La Désintégration », 2011), Philippe Faucon reste un homme des deux rives. « Fatima », son dernier film, fait encore honneur au cinéma français.